Qualité et sécurité des produits bucco-dentaires

par | 24 Fév 2022 | Articles | 0 commentaires

6 mois après la mise en œuvre du règlement européen sur les dispositifs médicaux, le Comident a rappelé, lors d’un point de presse du 19 octobre dernier, l’importance des enjeux liés à la qualité/sécurité des produits bucco-dentaires et fait plusieurs propositions pour en consolider l’approche. 

Le rôle du Comident

Le Comident est une association professionnelle représentant les TPE, les PME, les ETI spécialisés dans la fabrication et la distribution de produits dentaires. Le Comident compte aujourd’hui près de 150 entreprises du secteur qui réalisent environ 85 % du CA total en France. Le Comident a pour mission de représenter ses adhérents au niveau national et européen auprès des pouvoirs publics, des administrations, des médias et de l’ensemble des parties prenantes du secteur dentaire en concordant et animant leur position sur des sujets d’intérêts collectifs. Il accompagne et informe ses adhérents dans le domaine juridique, réglementaire, économique et social, il valorise et défend les intérêts des entreprises et de leurs produits commercialisés, il contribue à promouvoir leur rôle économique, social et de santé auprès de l’ensemble de ses partenaires. Enfin, le Comident négocie et conclut, avec les partenaires sociaux, la convention et les accords collectifs de travail du négoce en fournitures dentaires. 

Un nouveau paradigme  

Ces dernières années ont beaucoup transformé les pratiques des fabricants et distributeurs de produits dentaires. Il en a émergé un besoin de dialogue et une approche collaborative renforcée entre les entreprises, les prothésistes dentaires, les assistants et les chirurgiens-dentistes. Dans cet objectif, le Comident a mis en place une formation initiale et continue pour les chirurgiens-dentistes afin de les initier aux règles relatives à l’approvisionnement, la qualité, la traçabilité et la sécurité des produits.  Ensuite, afin de systématiser ce dialogue, au niveau national, une instance, sous l’égide des pouvoirs publics, réunissant toute la filière, pourrait être créée. Le Comident propose également de garantir une stabilité juridique aux industriels en évitant une surtransposition des règles européennes qui engendrent des coups de suivi et de mise en conformité importants et pas toujours justifiés. 

Responsabilités des fabricants

Il semblerait également qu’un comité de contrôle de l’administration soit nécessaire afin de lutter contre les risques liés à la commercialisation de produits contrefaits ou de mauvaises qualités ne répondant pas aux exigences de sécurité inhérentes aux produits de santé. 

Les fabricants sont responsables de leurs produits tout au long du cycle de vie des dispositifs médicaux, ils sont tenus de mettre en œuvre des plans de suivi de la surveillance après commercialisation qui s’articulent autour de 2 axes : 

  • la matériovigilance qui implique de répertorier et notifier les incidents graves pour prendre des mesures correctives en matière de sécurité, 
  • la surveillance qui implique le recueil proactif et l’analyse des données du dispositif en vie réelle et des informations disponibles sur les produits similaires pour vérifier que le rapport bénéfice/risque est toujours favorable. 

Avec cette nouvelle réglementation, ces principes doivent être appliqués par les fabricants mais aussi par les professionnels de santé, leur contribution permettra de mettre en évidence un plus grand nombre d’effets indésirables ou d’accidents liés à l’utilisation des dispositifs médicaux, et ainsi assurer la qualité des soins prodigués. 

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Résines, composites et monomères  

Dans la lignée de cet engagement pour une dentisterie plus biocompatible, des études ont été faites sur les blocs de résine composites utilisés dans la technologie de la CFAO pour savoir s’ils relarguent des monomères, ces fameux perturbateurs endocriniens. Déjà il faut savoir qu’ils sont divisés en 2 grandes familles : 

  • les blocs composés par un réseaux de céramique infiltrés par des monomères injectés sous très hautes pression  
  • les blocs composés de particules de charge de verre inertes compactés et fusionnés entre elles et infiltrés par des monomères injectés sous une très haute pression également. 

Les blocs à base de résine semblent connaître un succès plus important que les blocs en céramique en raison de leur plus grande facilité à être usinés, à être réparés et de leur cout moins important. 

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Produits de relargage

Publié dans Clinique Oral Investigation de 2021, l’étude a comparé entre eux les produits de relargage, mesurés par la technique de l’HPLC (High Pressure Liquid Cromatography) issus de 5 blocs différents utilisés dans la technique de la CFAO. Les blocs sélectionnés ont été : 

  • Les blocs de Cerasmart (GC monomère bis EMA UDMA autre UDMA)
  • Les blocs de Grandio (voco, monomère non divulgués par la société)
  • Les blocs de Lava Ultimate (3M, monomère UDMA)
  • Les shofu blocs (shofu, monomère UDMA TEG DMA)
  • Les blocs de Vita Emanique (vita : monomère UDMA TEG DMA)

Les 4 premiers sont des blocs à base de résine composite, le 5e est un bloc à base de céramique. Des parallélépipèdes, 5X5X4mm de chacun des blocs ont été préparés avec une scie de précision (isomet, buehler) et ont été plongés dans une solution dite milieu d’extraction à base d’un mélange éthanol/eau 75 %/25 %, pendant des périodes d’immersion variables d’une heure, 24 heures et 90 jours. Aux termes de ces périodes d’incubation, un volume de 0.5ml de la solution contenant les produits de diffusion a été prélevé pour réaliser une recherche quantitative et qualitative de monomères passés en solution en utilisant une technique adaptée à la détection de ces composants. 

Des monomères en solution

Voici les résultats : après 3 mois d’immersion, un total de 16.7microgrammes par millilitre de monomères a été enregistrés pour les shofu blocs, 13.4 microgrammes par millilitre pour les blocs de Grandio, 13.2 microgrammes par millilitre pour les blocs de Cerasmart, et 6.7 microgrammes par millilitre pour les blocs de Lava Ultimate. Après une période de 3 mois, le TEG DMA a été détecté seulement dans le groupe des Shofu blocs au même titre que le bisEMA avec les blocs de Cerasmart. Après une durée d’immersion d’1 heure, l’UDMA a été relarguée en quantité les plus faibles pour les blocs de Lava Ultimate et dans des quantités les plus importantes pour les blocs de Grandio (différence statistiquement significative entre les valeurs mesurées et comparées entre elles). 

D’une façon identique, les quantités de monomères relargués les plus importantes après 24H et 3 mois ont été observées pour les blocs de Grandio (différence enregistrée statistiquement significative). 

Conclusions et implications cliniques

Dans les conditions expérimentales, les blocs de Vita Enamique ne relarguent aucun monomère alors que les 4 autres blocs à base de résine composite le font. Le potentiel cytotoxique des blocs de CFAO en résine est lié à la nature et à la quantité des monomères passant en solution. On peut donc considérer que ces blocs peuvent avoir un potentiel de cytotoxicité dès lors que les seuils détectés seraient significatifs et suffisamment élevés. 

Ainsi ces premières observations doivent être complétées par de nouvelles études qui évalueraient les quantités de relargage sur des périodes de conservation plus longues et dans des milieux de conservations différents que celui de l’eau, notamment les solutions enzymatiques telles qu’une solution à base de pseudo cholinestérase. D’autres outils de mesure différents de l’HPLC pourraient également être utilisés pour mesurer des seuils de détection plus précis. 

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